L’objectif de notre projet est de doter les apprentis et agriculteurs de connaissances afin de répondre aux défis auxquels fait face le secteur agricole. La mise en place d’un programme de formation professionnelle innovant sur l’agriculture régénérative permettra de fournir des solutions pratiques pour transformer les paysages et les pratiques agricoles afin d’obtenir des méthodes de culture durables, des écosystèmes équilibrés et des produits sains.
Les systèmes agricoles industriels sont à même de produire de grands volumes de nourriture pour le marché mondial. Au sein de l’Union européenne, plus de 90 % des champs sont cultivés de manière traditionnelle. Or, ce type de culture s’accompagne de sérieux enjeux pour la santé humaine, le climat, la biodiversité, la fertilité des sols, les masses d’eau douce et l’écosystème dans son ensemble. Elle génère également une empreinte d’eau douce et d’azote colossale, tandis que l’agriculture représente jusqu’à 25 % de toutes les émissions anthropiques de gaz à effet de serre. (UNEP Foresight Brief, 013, mai 2019)
Toutefois, le changement climatique, qui entraîne une augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes tels que les sécheresses et les tempêtes, une pénurie potentielle d’engrais minéraux, l’érosion des sols, le déclin entre autres des pollinisateurs, n’est pas seulement exacerbé par l’agriculture conventionnelle mais représente également de sérieux défis pour le système agricole actuel en lui-même.
Alors qu’en 1990, 2,3 millions de tonnes de pesticides étaient utilisées dans le monde, ce chiffre atteint aujourd’hui environ 4,1 millions de tonnes. (Toxic exports. Exports of highly dangerous pesticides from Germany to the world. https://pan-germany.org/download/giftige-exporte-ausfuhr-hochgefaehrlicher-pestizide-von-deutschland-in-die-welt/; EU Pesticides database: https://ec.europa.eu/food/plant/pesticides/eu-pesticides-database/public/?event=activesubstance.selection&language=EN).
Les toxines agricoles n’affectent pas uniquement les plantes et les organismes vivants contre lesquels elles sont utilisées. Elles détruisent également les herbes et les insectes sauvages qui, à leur tour, viennent à manquer comme source de nourriture pour de nombreuses autres espèces animales. Nous assistons donc à une diminution critique de la biodiversité. Jusqu’à un million d’espèces sont menacées d’extinction, dont un grand nombre dans un délai de quelques décennies (2019 Report of the Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services (IPBES)).
Les pesticides contaminent nos aliments, nos eaux et pénètrent nos organismes. Plus de 90 % des fruits et légumes cultivés de manière conventionnelle sont contaminés par des résidus de pesticides. Ces résidus se retrouvent également dans les ressources en eau potable et sont coûteux pour les fournisseurs d’eau qui doivent les éliminer.
Les recherches sur l’impact potentiel sur la santé humaine montrent que l’exposition au glyphosate – l’herbicide le plus largement utilisé dans l’agriculture – est associée au lymphome non hodgkinien et à d’autres cancers hématopoïétiques. Le rapport du CIRC révèle que l’exposition au glyphosate provoque des dommages sur l’ADN et des dommages chromosomiques sur les cellules humaines, ainsi que des effets génotoxiques, hormonaux et enzymatiques chez les mammifères. (Andreotti, G. et al. Glyphosate Use and Cancer Incidence in the Agricultural Health Study. JNCI J. Natl. Cancer Inst. (2017). doi:10.1093/jnci/djx233; International Agency for Research on Cancer, W. H. O. WHO IARC Monographs Volume 112. Evaluation of five organophosphate insecticides and herbicides. 2 (2015).
23 % des surfaces terrestres ont enregistré une réduction de leur productivité en raison de la dégradation des terres (Rapport IPBES 2019).
Les pesticides altèrent et perturbent la population de microbes dans le sol et diminuent la population de champignons bénéfiques, qui jouent un rôle essentiel dans l’absorption de l’eau et des nutriments par les racines des plantes.
La fragilité des sols, notamment de la fine couche de la terre qui constitue la base de tout ce qui pousse et de presque tout ce que nous consommons, remet en question la » pérennité « (sustainability) de l’agriculture industrialisée. Dans de nombreuses régions, la fertilité des sols est en régression depuis des décennies, et de grandes quantités de sols fertiles ont été (et continuent d’être) déversées dans les rivières, les lacs et les océans. Ces quantités disparaissent à jamais, et avec elles, une grande portion de carbone provenant de l’oxydation de l’humus est libérée dans l’atmosphère sous forme de CO2, le tout ayant de graves implications économiques.
L’agriculture régénératrice répond à tous les problèmes précités car il s’agit d’une démarche de conservation et de réhabilitation des systèmes agricoles axée sur la restauration de la couche arable, le renforcement de la biodiversité, l’amélioration du cycle de l’eau, le soutien à la séquestration biologique du dioxyde de carbone, l’augmentation de la résilience au changement climatique et l’amélioration de la fertilité des sols. Ce modèle d’agriculture fondamentalement différent, reposant sur la diversification des exploitations et des paysages, permet de remplir un grand nombre d’objectifs de développement durable (SDGs), en particulier ceux qui concernent la réduction de la pauvreté (#1), l’éradication de la faim (#2), l’amélioration de la santé (#3), l’eau potable (#6), la croissance économique (#8) et la protection du climat (#13).
Cependant, l’un des plus grands défis auxquels nous sommes confrontés est le manque d’informations sur les solutions préexistantes. Les pratiques alternatives en matière d’agriculture et leurs impacts positifs ne sont pas encore enseignés dans les écoles d’agriculture ou les universités, où nous constatons un manque d’approches ciblées sur l' »agriculture » (éco)systémique et ses nombreuses relations causales bénéfiques entre les plantes et le sol.
Dès lors, l’objectif de notre projet est de fournir aux apprentis, aux agriculteurs et aux autres professionnels du secteur agricole les compétences et connaissances nécessaires pour appliquer des méthodes de culture alternatives qui sont non seulement bénéfiques pour l’environnement et les consommateurs, mais également économiquement envisageables pour les agriculteurs
En outre, les mesures de sensibilisation menées au cours du projet donnent au public une image cohérente de la situation actuelle de l’agriculture régénérative et contribuent à sensibiliser le public aux formes d’agriculture alternative, à leurs avantages et notamment à la possibilité d’accroitre les récoltes et le soutien dont elles bénéficient